1922, Einstein à Paris !

Il y a cent ans, Albert Einstein accepta l’invitation faite par Paul Langevin de venir à Paris, entre le 28 mars et le 10 avril 1922, pour une série de conférences. Sa seule présence suscita un vif engouement de la part de la presse et de l’opinion publique, mais aussi une vague de tensions révélatrices des préoccupations politiques, culturelles, institutionnelles et sociales du moment, au-delà des considérations purement scientifiques !

Raymond Lulle, journaliste : « Ovation frénétique, à laquelle sont entraînés ceux mêmes qui se proposent de combattre le plus durement le héros du jour. Speech très simple et plein de tact de M. Croiset, qui montre comment le Collège de France a toujours accueilli les maîtres de la pensée humaine.
Il donne la parole à Einstein, qui, très ému, ne sait comment commencer. Le voisinage de Langevin, assis près de lui, semble lui donner du courage et il aborde très simplement son sujet. Einstein commence en rappelant que bien que les mathématiques servent d’instrument à la physique, il ne suffit pas de mettre la physique en équations et de jongler avec celles-ci. Le langage est très clair, la gaucherie même du vocabulaire fait image. Et puis, il y a le geste : c’est celui du sculpteur dont la main caresse des formes présentes, quoique irréelles. Il a des formes plein les mains, les déplace, les dirige. Et il s’amuse prodigieusement avec ses joujoux fictifs. Sa figure prend l’air épanoui du gamin qui fait des niches. »

Le souvenir et l’image

Sous l’histoire, la mémoire et l’oubli.

Sous la mémoire et l’oubli, la vie.

Mais écrire la vie est une autre histoire.

Inachèvement.

Paul Ricœur

Le violoncelle bleu (2021) – Huile sur feuille Imagine 350g – 100x70cm

On lit ceci dans la proposition 18 du Livre II de l’Éthique, « De la nature et de l’origine de l’âme » : « Si le corps humain a été affecté une fois par deux ou plusieurs corps simultanément, sitôt que l’Âme imaginera plus tard l’un des deux, il lui souviendra aussi des autres. » C’est sous le signe de l’association des idées qu’est placée cette sorte de court-circuit entre mémoire et imagination : si ces deux affections sont liées par contiguïté, évoquer l’une – donc imaginer –, c’est évoquer l’autre, donc s’en souvenir. La mémoire, réduite au rappel opère ainsi dans le sillage de l’imagination. (Éthique de Baruch Spinoza, tradAppuhn)

Paul Ricœur

Rostropovitch jouant une sonate de Bach au pied du Mur de Berlin.

« Je suis venu jouer ici pour que l’on se souvienne de tous ceux qui sont morts à cause de ce Mur ». Le 11 novembre 1989, le virtuose russe en exil Mstislav Rostropovitch saute dans un vol Paris-Berlin. Le vieil homme, son violoncelle à la main, se fraie un chemin au milieu de la foule exaltée rassemblée au Checkpoint Charlie, mythique point de passage entre l’est et l’ouest. Image qui a marqué les esprits et fait le tour du monde.

Autour de la Fontaine…

« Je n’aurais jamais imaginé, après tant d’années d’enseignement, de lutte contre tous les racismes, contre tous les antisémitismes, de devoir en arriver Là !
Je voudrais associer cette journée du souvenir à tous mes camarades résistants qui se sont dévoués et qui ont caché des familles juives, qui ont caché des enfants juifs, et je regrette amèrement – je ne suis pas découragée – je suis indignée et révoltée parce que nous vivons dans « le plus beau pays du monde », avec une population formidable, et que nous voyons encore tant de haine. Pourquoi toute cette haine ? Aujourd’hui, ce sont les juifs, demain ce sera encore autre chose. Après demain, ce seront les femmes, les homosexuels… Mais où cela va-t-il finir ?
Je fais appel au cœur, je fais appel à l’humanité, je fais appel vraiment à tout ce qu’il y a de bon dans ce peuple français qui est extraordinaire. Arrêtons la haine ! Où va-t-on sur ce chemin là ? Vous savez, j’ai connu 33… Je sais où ça commence, mais on n’sait pas comment ça va finir. Alors, faisons tout notre possible pour que cela finisse bien. Et que nous vivions tous ensemble dans un pays extraordinaire, et par-dessus tout, Liberté, Égalité, Fraternité, c’est le plus beau nom de notre République à tous ! »

Génia Obœuf
Place de la Résistance

Photo : Génia Obœuf, assise sur le rebord de pierre de la fontaine de la Place de la Résistance, était présente ainsi que de nombreux citoyens, partis politiques et mouvements de la Nièvre, dont Place Publique, à l’appel à la mobilisation contre l’antisémitisme du mardi 19 février 2019, organisé à Nevers.