Aquarius

« On ne devrait s’aimer que sur un navire, un radeau, on le laisse aller, une fois tout fini, et tout le reste du monde est sauf. »

( Jean Giraudoux, Suzanne et le pacifique)

Aquarius (2022) – Huile sur papier (64x45cm)

« Métaphore de la solitude et de l’isolement, mais de la solitude et de la réclusion choisie, comme tentative de se parler à soi-même, l’île, comme l’écriture qu’elle abrite souvent, figure en littérature, le lieu clos des récits de l’enfermement. Elle s’offre à la méditation sur le deuil, l’exil et l’innocence perdue. Entre le pôle insula et le pôle isola, les îles hébergent toutes sortes de songes allant de l’amour exclusif, au rêve du retour à l’Eden et à une nature idyllique ou encore à une monastique saison du ressourcement où s’arrêterait le temps.

[…]

Le désir de fusion ou de confusion dans le corps maternel, comme lieu de l’origine, constitue un ancrage pour l’écriture, pour le travail artistique en général pour le travail psychanalytique en particulier. La présence d’une île donne un berceau à la création, création artistique ou création des enveloppes du moi qui lui permettront de quitter l’île et de voguer vers le vaste monde. »

Martine Vautherin-Estrade, psychanalyste : http://www.martine-estrade-literarygarden.com/psychanalyse-art/psychanalyse-art-metaphore-ile.php

Comme dans un miroir

«  Dans la nature, tout a toujours une raison. Si tu comprends cette raison, tu n’as plus besoin de l’expérience. »

Léonard de Vinci

Le Rouge et le Noir reste à ce jour l’un des titres les plus énigmatiques de l’Histoire de la Littérature, sur lequel Stendhal n’a jamais voulu donner d’explication. Pourtant, il proposa dans son roman cette définition : « Un roman est un miroir qui se promène sur une grande route. Tantôt il reflète à vos yeux l’azur des cieux, tantôt la fange des bourbiers de la route. Et l’homme qui porte le miroir dans sa hotte sera par vous accusé d’être immoral ! Son miroir montre la fange et vous accusez le miroir ! Accusez bien plutôt le grand chemin où est le bourbier, et plus encore l’inspecteur des routes qui laisse l’eau croupir et le bourbier se former. »

Basic & Rabbit au musée. (28-11-2020)

À travers la métaphore assimilant le roman à un miroir, Stendhal lance donc un défi implicite aux historiens du futur : comment à la fois faire « apparaître », « disparaître » et « conserver » dans un récit romanesque, la parole des hommes du passé à travers leur isolement individuel et leurs tentatives collectives, sans jamais décrocher de la réalité globale politique, économique et sociale en constante évolution « la vérité, l’âpre vérité » de la perspective temporelle 1 ?

1. La perspective temporelle, un concept introduit par le psychologue américain Philip G. Zimbardo, englobe l’orientation dans le temps (l’importance accordée au passé, présent, futur) et l’attitude (positive, négative, fataliste, hédonique) par rapport au temps passé, présent et futur.

Anne-Marie Meininger : « Ce titre a suscité tant d’interprétations, donne tant de sens au roman, qu’il paraît préférable de connaître plutôt l’explication de Stendhal lui-même, rapportée par Émile Forgues dans Le National du 1er avril 1842 : « Le Rouge signifie que, venu plus tôt, Julien (le héros du livre) eût été soldat ; mais à l’époque où il vécut, il fut forcé de prendre la soutane, de là le Noir. » Il semble que le nouveau titre écarte Julien de son simple destin individuel et en marque le fond politique, avec surtout le grand vol noir des soutanes, la puissante nuisance de la Congrégation. Après tout, c’est à cause de la lettre d’un prêtre que Julien finira guillotiné. »

Mimèsis

Notre époque peut facilement se résumer par les premières lignes magistrales d’un célèbre roman de Charles Dickens « A Tale of Two Cities », en français « Le Conte de deux cités » :

« C’était la meilleure des époques, mais aussi la pire. Le siècle de la folie et celui de la sagesse ; une époque de foi et d’incrédulité ; une période de lumières et de ténèbres, d’espérance et de désespoir, où l’on avait devant soi l’horizon le plus brillant, la nuit la plus profonde ; où l’on allait droit au ciel et tout droit à l’enfer. »

Le point de départ (2020) – Technique mixte sur papier – 50x40cm

La ressemblance avec notre propre époque bruyante – ici, et maintenant – est trop évidente pour qu’on la rate. La farce bruyante qui passe pour un « débat » télévisé est une illustration éloquente de notre situation, dans laquelle nous sommes en proie à des oppositions appariées, le bien contre le mal, le monstre contre le saint, le nationalisme contre la sédition, le noir contre le blanc. Les deux pôles de ces complémentarités dichotomiques s’accrochent si fort qu’il y a peu de possibilités de discours civilisé. Nous sommes poussés dans un monde de compréhension instantanée. Aucune question n’est jamais ouverte ; il n’y a rien d’incertain qui nécessite une réflexion. Tout ce qui doit être compris a déjà été compris et est facilement disponible sous forme de capsules auprès des marchands ambulants de produits politiques. La recherche de parallèles historiques en a attiré plus d’un vers l’Europe de l’Est. Les années trente, les furies déchaînées du « nationalisme », l’émergence de démagogues populistes cultivant assidûment le culte du héros, le fragile consensus international, tremblant au bord d’un conflit à grande échelle – les grandes similitudes sont trop faciles.

Ce qui est vraiment alarmant, c’est la profondeur à laquelle va la comparaison ; l’aspiration volontariste à transcender, d’un seul coup fatal, les misères accrochées du présent ; « les Juifs », « les musulmans », « les pauvres », peu importe ; la tentation d’échapper à l’obstination de l’histoire pour se réfugier dans la souplesse fluide du mythe ; le recours flagrant à la violence vigilante comme moyen de faire taire la dissidence, voire le scepticisme minimal qui est la condition préalable à la pensée elle-même. Tout cela n’est que trop évident, même lorsque – peut-être même parce que – cela devient indicible dans l’espace public. Les personnes impliquées sont impuissantes. Dans ces salons, on ne pouvait pas discuter des choses qui intéressent tout le monde, des problèmes politiques et religieux du moment. Comme ces personnes sont conscientes qu’elles ne croient plus en ce qu’elles représentent, et qu’elles sont vouées à être battues dans toute discussion publique, elles choisissent de ne parler que du temps, de la musique et des rumeurs de la cour. Et lorsque cela s’avère insuffisant, de crier, de se mousser dans des propos abusifs, puis en violents « nationalismes ».

Y a-t-il un moyen de sortir de ce gouffre, de ce désert cacophonique de contrariétés radicales dans lequel nous nous trouvons ? Franchement, je n’ai pas d’espoir. […] En effet, une des conséquences de la polarisation est la mort de la nuance, de la distinction. Avoir des visions alternatives pour notre condition commune est essentiel dans la politique démocratique. La dissidence n’est pas une sédition et se donner des raisons les uns aux autres, la persuasion, la conversation, est un bon indice d’une démocratie. De ce fait, je crains que, malgré tous les aspects carnavalesques de nos élections, la diversité colorée que nous célébrons alors même que l’idéologie dominante agit de multiples façons pour la supprimer et la subvertir, nous ne nous en tirions pas si bien. Le choix des scélérats varie, mais la cacophonie de notre discours politique polarisé produit un cynisme croissant à l’égard de la classe politique, plein de dangereux présages. Le fossé qui se creuse entre ce qui est réellement populaire – du, par et pour le peuple – et ce qui est populiste, générant des majorités instables, devrait nous préoccuper tous, par-delà les grands clivages.

Alok Rai,  professeur d’anglais à l’Institut indien de technologie de New Delhi.

Lune rouge

Les jours sont des fruits et notre rôle est de les manger, de les goûter doucement ou voracement selon notre nature propre, de profiter de tout ce qu’ils contiennent, d’en faire notre chair spirituelle et notre âme, de vivre.

Jean Giono

Le fruit défendu (2020) – Technique mixte sur papier – 50x40cm

Le terme menstruation vient du mot latin mensis « mois » (proche du grec mene, la lune) qui évoque une parenté avec les cycles lunaires mensuels.

Phoenix

Lorsque cet Oiseau constate qu’il se fait vieux,

Il érige pour lui-même un bûcher funéraire

Fait de rameaux parfumés de mortels envieux.

Puis il attire sur lui les rayons du Feu-Solaire,

Bat des ailes afin d’attiser ses vives flammes,

Et s’immole enfin dans ce grand feu salutaire.

Le verrons-nous se consumer, afin de renaître

Purifié, porteur d’une parole pleine de lumière

Qu’il régénère en un nouveau bréviaire ?

Lorsque le Phoenix constate qu’il se fait vieux,

Il érige pour lui-même un bûcher funéraire,

Fait de rameaux aromatiques.

Il se tourne alors vers les rayons solaires

Battant des ailes pour attiser la vive flamme,

Il s’immole et le feu le consume.

Cependant le neuvième jour après,

L’oiseau renaît de ses cendres.

Impression

I got the church key

The Horrors – I can see through you from White Rabbit on Vimeo.

I got the church key
Moving in the night
Don’t you wish you could live this lie?
I couldn’t talk about
Filling up with longing
Pale horse, green eyes
‘Cause I can see through you and I don’t get it
I can see through you and there’s no way
I can see through you
I can see through
I can see through you and I don’t get it
I can see through you and there’s no way
I can see through you
I can see through
La la la la la
Some people see you
To me you’re just see-through
No one remembers your name
No one tries
And let you step outside
In the fever of evening
No one remembers your name
No one tries
‘Cause I can see through you and I don’t get it
I can see through you and there’s no way
I can see through you
I can see through
‘Cause I can see through you and I don’t get it
I can…